Dépêche-toi avant que quelqu'un arrive.

Après un dernier coup d'oeil à la rue enneigée, Ashka rentra à la suite de Timur dans la maison. Selena y était déjà et les attendait, bras croisés. Si Ashka était revenue sur sa terre d'origine et que Timur y avait toujours vécu, Selena venait d'Europe de l'ouest, d'Espagne plus précisément. Son accent, ses longs cheveux bruns et son caractère le faisait bien ressentir. Tapant du pied, la jeune femme tourna les talons et s'installa dans un canapé du salon. Timides, Ashka et Timur se regardèrent un instant sans bouger. Les trois n'avaient presque rien en commun, si ce n'est leur regroupement soudain. Ensemble, ils avaient décidé de bouger de squat en squat afin de vivre. Ashka avait abandonné l'Ecosse après le départ de Hunter. Ne souhaitant pas se rendre à nouveau en Amérique, c'est vers la Russie qu'elle s'était tournée. Néanmoins, reniée par ses parents et n'ayant pas un sou, elle n'avait pas d'autres possibilités que de vivre clandestinement. Le retour aux sources de A à Z. Parfois, la Hanson pensait à Jessica et Natacha ; elle les avait abandonnées sans un mot mais peut-être que ce n'était pas plus mal après tout, elles ne chercheraient pas à la retrouver.

Ash, tu fous quoi ?

La jeune femme secoua la tête. Timur s'était assis en face de Selena qui la regardait en haussant un sourcil. Soupirant, elle se dépêcha de les rejoindre. Ils revenaient tous trois d'un petit appartement au nord de la ville. Personne ne les avait apparemment démasqués mais on n'était jamais assez prudent. Selena avait ainsi pris la décision de changer d'endroit, ce qui n'était pas plus mal compte tenu que le squat était bien plus grand que le précédent. Ashka s'assit lentement en dévisageant Selena. Elle n'avait pas encore réussi à la cerner. Elle lui ressemblait sans lui ressembler. C'est pourquoi la Hanson comprit que cette réunion improvisée n'avait aucun sens. À chaque fois que le trio changeait de squat, chacun allait à ses occupations sans se préoccuper des autres.

Que nous vaut l'honneur de ce regroupement ?

La grande brune décroisa les bras pour poser ses mains sur ses cuisses.

Je m'en vais.

Le regard bleu océan de Mia ne décrochait pas du tableau qu'elle apercevait dans le dos de la dénommée Volvia. Un splendide Chagall trônait dans le Hall, symbole de la richesse du dénommé Paul. Amatrice d'art, la Lorder Jannings savourait ce plaisir des yeux. Décidément, les Russes étaient des gens de bon goût. La blonde détailla Volvia. Elle était une de ces beautés typiques que les grandes steps de Russie gardaient jalousement. A bien des égards, elle ressemblait à Ashka.

• Enchantée Madame. Natalia m'a beaucoup parlé de vous. Je prendrais bien un petit doigt de vodka dans mon thé. fit-elle en se tournant vers un elfe de maison replié sur lui-même qui passait par là. Le trio de brunes & Paul se dirigèrent vers le salon d'apparat de la demeure. D'autres personnes étaient déjà là & buvait du champagne dans des coupes en cristal. Tous se tournèrent vers les nouveaux arrivants, détaillant plus particulièrement Mia. Natalia prit alors la parole :

• Mes amis du CAMP, voici Miss Lorder Jannings. Traitez là avec tout les égards qui lui sont dû. N'oubliez pas, Ashka nous a trahit, nous devons la récupérer. Ou notre organisation courra à sa perte.

Sans se soucier de ce que l'on pouvait bien raconter sur elle, l'ancienne professeur de photographie attrapa la tasse remplie de thé que lui tendait un elfe. Sirotant tranquillement sa boison, elle se demandait bien ce que cette étrange Communauté pouvait bien vouloir à celle qui fut un temps son élève.

[ Dans quel pétrin t'es-tu fourrée, Ashka ? ]

Depuis qu'elle s'était fait prendre dans le bureau d'Opale avec Artus, Mia était en fuite. En Angleterre, elle était en danger. Albatros, son père, l'avait alors recommandé à Volvia, une vieille connaissance. Cette dernière avait accepté à une seule condition : que Mia retrouve Ashka. La russe connaissait les talents de fouineuse de la blonde & marchanda ainsi sa protection. Elle alla même jusqu'à, dans une de ces lettres, menacer la Lorder Jannings de la dénoncer au Ministère Anglais. Mia n'avait pas le choix, elle avait dit oui. Cette dernière s'approcha de Volvia, qui s'était éloignée dans un coin. Elle voulait savoir. Qu'avait donc fait son élève pour qu'il soit si urgent de la retrouver ?

• Excusez moi. J'ai du mal à comprendre. Qu'a fait votre fille pour être traquée ainsi ?

Ashka resta sans bouger quelques secondes à fixer Selena. Tout cela n'était pas réel. Elle ne pouvait pas les abandonner. Pas alors qu'ils venaient d'arriver dans cette maison. La brune était la seule personne sur laquelle Ashka pouvait compter dans cette situation. Non pas que Timur n'était pas gentil, mais il était d'une inutilité sans pareille. La Hanson soupira en baissant les yeux. La jeune femme en face, quant à elle, était restée droite en la regardant dans les yeux. Aucune d'elles ne flancherait. Si ce n'était pas dans la nature de Selena de prendre la parole en première, Ashka avait trop de fierté pour lui demander pourquoi. Contre toute attente, c'est Timur qui prit la parole. La Hanson avait oublié qu'il était dans la pièce, et lorsqu'elle tourna la tête, elle vit qu'il était au bord des larmes. La jeune femme leva les yeux au ciel.

Pour...pourquoi ? Tu...tu peux pas nous abandonner comme ça...

La blonde vit que son amie se retenait de soupirer d'agacement. Celle-ci se recula au fond de son siège et croisa ses jambes.

Vous n'avez plus besoin de moi, à présent. De plus, je dois faire ma vie seule autre part, quitter la Russie. Comptez l'un sur l'autre, c'est le plus important.

La situation était néanmoins des plus ridicules. Timur était encore un enfant dans sa tête. Ashka ne pouvait rien tirer de lui, elle se retrouvait simplement dans la situation d'une mère coincée avec un fils encore trop innocent. La jeune femme hocha de la tête en observant Selena. Elle ne pouvait pas l'empêcher de faire ses choix.

Tout se passa alors très vite. Ashka prit sa tête entre ses mains. Elle entendait Timur qui tentait de parler à Selena, des promesses, une porte claquer, des jurons en russe. Elle voyait flou, puis le noir complet. La raison venait à l'emporter sur son coeur. Ils étaient foutus. Ils ne pouvaient pas survivre sans elle. N'importe qui pouvait la retrouver : la полиция ou encore Jessica et Natacha. Les paroles de Timur berçaient le cerveau d'Ashka. Bientôt, elle n'arrivait plus à penser à rien.

Что мы сделали, чтобы заслужить это? Адское дерьмо.

Le néan. Les souvenirs. La peur.

Ashka était face à Volvia et Daryl. Ses parents étaient dans une colère telle qu'elle ne l'avait jamais vue. Vovia tenta de rester calme lorsqu'elle s'approcha pour prendre la parole.

Ne songe même pas à revenir ici lorsque tu seras de nouveau seule. Nous t'avons fait une proposition et tu l'as refusée. Dorénavant, c'est terminé.

Ashka resta immobile, ne sachant que faire ou quoi dire. Si ses parents l'avaient déjà menacée plusieurs fois, elle savait que ce jour était plus important que tous les autres. Elle n'avait plus d'autre choix que de retourner en Ecosse. Elle aurait peut-être la possibilité de trouver un job là-bas.

On était deux ans plus tard. Et c'était devenu encore pire.

UN AN & QUELQUES MOIS AUPARAVANT - PRÉ-AU-LARD

Une jeune femme & une adolescente de 19 ans sont dans un Parc. L'une d'elles est allongée au sol, un appareil photo dans la main. Elle est concentré sur un Papillon qui butine délicatement une fleur. L'autre femme l'observe avec attendrissement. L'élève & le maître. Ashka & Mia. Soudain, on entend un petit bruit, caractéristique d'un déclencheur d'appareil. Un flash apparaît, effrayant le papillon. Au lieu de fuir, ce dernier explose en une multitude de paillettes arc-en-ciel. De rage, Ashka les chasses de devant son visage, sous l'oeil amusée de sa professeure.

Calme-toi Ashka. Tu avais simplement oublié d'enlever le flash. Concentre-toi, respire & recommence.

La blonde sortit alors sa baguette magique. Un petit insecte fit son apparition au bout de cette dernière avant de se mettre à virevolter autour d'une Ashka passablement excédée par le comique que réussissait à voir Mia dans cette situation.

Je déteste les papillons, Mia. Le meilleur ami de ma mère en avait une collection, sous une boite de verre, en Russie. Je trouvais ça horrible d'infliger ça à ces insectes mais finalement, peut-être qu'ils le méritent...


La Lorder Jannings observait le mur en face d'elle, tout un sirotant son thé. Des grands monarques étaient épinglés, sous une boite en verre, magnifiquement bien conservés. Volvia semblait lui parler mais la jeune femme n'écoutait pas. Elle était obnubilée par la collection d'insectes de Пол. En Amérique du nord, les grands monarques migrent vers la fin du mois d’Août. Ces petites créatures traversent les tempêtes, malgré leur faible constitution. Mais ils n'arrivent pas tous à survivre. Certains meurent & l'on retrouve leur corps sur le bitume des autoroutes américaines. Mia pensa que son coeur était emplit de grands monarques écrasés sur la route. & Ashka en était un.

La professeur de photographie s'était vraiment attaché à l'élève. Elle l'avait présenté à James, son défunt fils. Ashka lui faisait penser à elle-même, en plus jeune. Mia aussi s'était retrouvé jeter dans l'océan qu'est la vie, sans aide, sans parents. Elle s'était débrouillé. Alors la Lorder Jannings avait prit Ashka sous son aile. Elle lui avait apprit tout ce qu'elle savait en terme d'art. Elle l'avait aidé financièrement, quand la jeune elfe n'avait pas pu payer ses cours.

Mais aujourd'hui, Mia n'était plus professeure. Elle était traquée. & à son tour, elle allait devoir partir à la recherche de quelqu'un. La traquée traqueuse. La blonde s'intéressa à nouveau à Volvia, la mère d'Ashka. Elle continuait de lui parler, comme étrangère à cette femme qui ne l'écoutait pas.

Nos activités au C.A.M.P sont parfois... contraire à l'éthique humaine. Mais rien d'illégal. Seulement, Ashka nous a dérobé quelque chose qui, s'il tombait entre de mauvaises mains, nous causerait bien du tord. Ma fille ne se rend pas compte de ce qu'elle fait. Ce n'est qu'une enfant.

Mia esquissa un sourire. Elle aussi, elle n'était qu'une enfant.

Je trouverais votre fille, c'est promis. J'ai déjà commencé à faire des recherches. Ashka sait que je suis en Russie. Elle viendra d'elle-même.


& tandis que Mia discutait avec Volvia, un petit insecte s'envolait vers le squat d'Ashka. C'était un frêle papillon orangé, magnifique, éphémère. Il n'était pas fait pour la froideur des steps de Russie. Mais ce grand monarque était magique. Quand Ashka le verrait, il exploserai en paillettes arc-en-ciel. L'élève allait retrouver son maître.

Ashka était enfermée dans la salle de bain de la maison, recroquevillée sur elle-même. Selena était partie depuis plusieurs semaines, à présent, mais rien n'avait changé. L'ambiance était toujours identique à celle qui avait régné lorsque la jeune femme avait quitté le squat. La Hanson ne voyait Timur que très rarement. Ils vivaient chacun leur vie de leur côté, sans se soucier de l'autre, ne se souciant absolument pas du conseil que Selena avait donné avant de partir. Ashka n'avait plus peur. Néanmoins, son corps ne la suivait plus, comme en manque. Ses actions étaient monotones, aucune émotion ne sortait d'elle ou la saisissait.

Le soleil tapait contre la vitre de la pièce, ce qui força Ashka à changer de position. Elle n'arriva pourtant pas à trouver une place confortable, dos au jour, ce qui l'ammena à se lever. La jeune femme n'était pas sortie de la maison depuis plusieurs jours, elle mangeait là où il y avait de la place, sans prendre aucune nouvelle de Timur encore. Lorsqu'elle descendit les escaliers, elle ne le croisa d'ailleurs pas. L'ancienne Serdaigle poussa doucement la porte et sortit. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle faisait. Ses nuits étaient de plus en plus courtes, et ses pensées chaotiques. Elle resta donc ainsi, face à la lumière, le vent lui fouettant le visage, les manches courtes de son tee-shirt retroussées. Elle n'avait pas froid. Elle était juste bien.

La Hanson ignorait combien de temps elle était restée ainsi. Elle avait fermé les yeux quelques instants, les mains rentrées dans les poches, à savourer l'air frais. Mais c'est lorsqu'Ashka sentit quelque chose lui picoter le nez qu'elle revint à la réalité. Ses paupières se relevèrent doucement, et elle put aperçevoir un magnifique papillon orange posé sur l'avant de son visage. Un inconnu qui passait par là aurait seulement saisi l'étrangeté de la scène, mais pour la jeune femme, cela relevait de l'horreur. Il était impossible pour elle de faire le moindre mouvement, comme tétanisée. Soudainement, l'insecte explosa en une pluie multicolore. Ashka sentit son cœur recommencer à battre normalement après son emballement inattendu.

■■■

Tu sais, en Russie, il y avait un jardin où j'allais toujours pour échapper aux réunions familiales. Il n'est pas très grand et il n'y a pas de papillons, mais le paysage est magnifique. Si je devais retourner là-bas, j'irai seulement pour y prendre des photos.

Ashka ne s'était jamais intéressée à l'art auparavant. Elle n'avait ainsi aucune photographie à présenter à Mia. Fatiguée de prendre des clichés de ces stupides insectes sans jamais y parvenir, l'adolescente s'était allongée sur le sol, son œil gauche obervant la salle à travers l'objectif. La Russie avait toujours eu de mauvais côtés, mais au fur et à mesure que le temps passait, elle apprenait à apprécier les bons.


Une question trottait pourtant dans la tête de l'ancienne élève. Que faisait Mia ici ? Et pourquoi l'avait-elle appelée ? Elle n'était sans doute pas ici pour prendre des photos. Ashka attrapa un manteau à l'intérieur de la maison, claqua la porte, et, les mains dans les poches, transplana dans ce fameux jardin. Il n'avait pas changé. Excepté une silhouette qui n'était pas singulière à l'endroit. La Hanson s'approcha de son ancienne professeure.

Eh bien bonjour.

Ashka ne répondait pas à son ancienne professeure. Elle restait de marbre, dévisageant le visage de Mia Lorder Jannings. Pourquoi souriait-elle ? Cela n'avait aucun sens. La jeune femme ne comprenait pas ce que tramait Mia mais elle ne doutait pas du fait qu'elle le saurait bien assez tôt. Toujours silencieuse, l'ancienne Serdaigle inclina légèrement la tête pour inciter sa camarade à continuer. Celle-ci le fit immédiatement et dès ses premières phrases, Ashka comprit que venir avait été une terrible erreur. Mia venait de déterrer ce qu'elle avait mis deux ans à s'efforcer d'oublier.


Les rangs du C.A.M.P. sont très prestigieux, tu dois y entrer. Avec ça, tu seras respectée ici et dans le monde. Tu ne nous imagines pas, toutes les deux, à la tête d'une des plus grandes actions de Russie ?

Les yeux de Volvia brillaient d'étoiles tels que Ashka ne les avait jamais vus. Non, elle ne pouvait pas faire ça, non, elle ne les imaginait pas ainsi. Pas alors que, pour l'instant, Daryl maintenait sa mère à la raison et faisait en sorte qu'elle ne débloque pas comme depuis que William Jones avait quitté le foyer familial avec Ellena. Tout allait bien, il se passait quelque chose.

Tu sais que je ne peux pas, maman. Toi comme moi savons que ça ne durera pas.


Mais ça avait duré. Et à présent, deux ans après, Mia était là, à tenter de la convaincre de changer d'avis, omettant tout ce qui pourait avoir un quelconque rapport avec sa propre présence en Russie. Ashka ne souleva néanmoins pas ce point. Elle avait enfoncé ses mains plus profondément encore dans ses poches en observant les détails du visage de son interlocutrice. Elle savait ce qu'elle avait fait mais elle ne pouvait pas revenir en arrière. Pourquoi alors tenter de changer le cours des choses ? Rien ne serait plus jamais pareil.

J'ai pris une décision il y a deux ans mais elle n'a pas changé. Je me fiche que Volvia soit en colère, elle l'a toujours été. Ainsi, je n'ai rien à voir avec le C.A.M.P. et ses activités et ce n'est pas plus mal ; vouloir agir dans l'ombre m'aurait plus mise en danger que je ne le suis actuellement.

Ashka ne comprenait pas. Revenir au Manoir l'achèverait. Après tous ces mois d'attente, elle serait le chef-d'œuvre de Volvia. Mia ne semblait néanmoins pas être d'accord avec les pensées de la jeune femme.


Le vent soufflait à l'extérieur du Manoir et claquait sur les fenêtres closes. Postée devant l'une d'entre elles, Ashka venait de se promettre de partir dans les dix prochaines minutes. Elle ne savait pas où, elle ne savait pas vraiment quand mais elle le devait. Les choses n'allaient pas en s'arrangeant. Dans un état second et sans vraiment s'en rendre compte, la jeune femme s'était saisie d'un rouleau posée sur le bureau de Volvia. Elle s'était alors approchée de la porte d'entrée, rabattu sa capuche sur la tête et avait franchi le seuil en murmurant deux mots à peine audibles.

Adieu maman.


Depuis ce jour, Ashka n'avait jamais ouvert le rouleau et le gardait toujours précieusement sur elle. Après deux ans d'attente, elle venait, en quelques secondes, d'apprendre ce qu'il contenait. Elle apprit également que Volvia et Daryl avaient divorcé. La jeune femme ne laissa rien paraître sur son visage. Elle se doutait que son père adoptif n'avait plus la même influence sur sa mère que celle qu'il avait eue au début de leur relation. Ashka avait légèrement baissé la tête depuis le début de son entrevue avec Mia. Sa confiance en elle avait baissé au fur et à mesure que les souvenirs remontaient. Tout était si flou. Sa voix tremblait quand elle décida de reprendre la parole.

Je me suis fait la promesse de ne jamais remettre les pieds là-bas. Protection à la clef ou non, preuves ou non. J'ignore ce que tu as à voir là-dedans, mais débrouille-toi sans moi.

Le rouleau s'était retrouvé déchiré par le stress dans la poche d'Ashka. C'est les mains moites que la Hanson adressa un dernier signe de tête à Mia avant de tourner les talons.

C'est terminé, Mia.

Ashka avait tourné les talons et attendu d'être hors du champ de vision de Mia pour transplaner. La jeune femme ignorait où elle allait, elle ne contrôlait plus rien. Sa tête et ses émotions avaient pris le relai. Alors, en un claquement de doigts, elle se retrouva devant son ancien immeuble à Pré-au-Lard. La Hanson resta immobile pendant un long moment. Elle ne comprenait pas. Pourquoi ici ? Ashka souffla lentement en levant la tête. Son ancien appartement semblait sans vie, verrouillé. Jessica et Natacha y vivaient-elle encore ? Ashka commençait à penser à retrouver son ancienne vie. C'était peut-être le moment, finalement. Mia et Volvia devraient bien comprendre qu'elle ne remettrait pas les pieds dans le C.A.M.P., il pouvait s'agir d'un bon moyen de leur faire passer le message.

Sans prendre un instant de plus pour réfléchir à sa décision, l'ancienne Serdaigle entra dans le bâtiment et gravit les marches de l'escalier jusqu'au troisième étage. Elle posa sa main sur la porte de l'appartement 34 avant d'y appuyer le haut de sa tête. Qu'est-ce qu'elle était en train de faire ? Elle ne savait même pas si ses amies y étaient encore. Alors, prenant son courage à deux mains, Ashka déverrouilla l'entrée d'un coup de baguette magique. L'appartement était plongé dans le noir, et reflettait exactement l'impression qu'il donnait de l'extérieur : il semblait sans vie. La jeune femme alluma les lumières en marchant à travers les pièces, rien n'avait changé depuis son départ. La Hanson s'installa sur le canapé du salon. Jess avait toujours voulu donner un côté moldu partout où elle allait et l'appartement n'y avait pas échappé. On y retrouvait des souvenirs de voyages un peu partout, et des engins dont Ashka ignorait l'utilité et le fonctionnement.

Malgré le fait d'être revenue là où tout avait commencé, Ashka restait perdue. Où étaient passées ses anciennes colocataires ? Combien de temps mettrait sa mère pour la retrouver ? Volvia n'avait pas hésité à utiliser Mia, qui sait si elle se servait de Jessica ou de Natacha. La Hanson s'aggripa au canapé en pensant à Ellena. Qu'était-elle devenue ? Etait-elle dans le viseur de Volvia ? Ashka tomba en arrière en s'appuyant contre le dossier du sofa. Elle ne serait pas tranquille pendant un bon bout de temps. Elle savait que Mia ou des membres du C.A.M.P. la retrouveraient. Combien de temps encore devra-t-elle fuir et se cacher ? Pourquoi avait-elle rejoint Mia dans le parc cette heure-là ? Que ce serait-il passé si Selena était restée ?

Des questions.

Trop de questions.

Riverdale. Combien de temps s'était écoulé depuis le dernier épisode ? Les souvenirs remontaient petit à petit alors que Ashka et Mia observaient la télévision éteinte de Jessica. Le monde semblait sans vie. Pourquoi ? Que s'était-il passé ? Elle n'en avait aucune idée. La jeune femme ne savait pas comment réagir dans cette situation improbable. Elle ignorait tout des émotions. Devait-elle pleurer ? Rire ? Ou bien se rendre une bonne fois pour toutes ? La Hanson observa la rue à travers la vitre derrière l'écran noir. Cinq minutes.

Non, personne ne pouvait l'aider. Non, elle ne pouvait plus faire confiance à personne. Elle avait perdu la confiance de Jessica et de Natacha en fuyant Londres pour la Russie, elle avait eu peur de s'intéresser à nouveau à Hunter, elle n'avait pas cherché à reprendre contact avec Ellena. Non, elle ne savait pas être une bonne personne. Elle était toxique avec ses proches et elle refusait que Mia en souffre aussi. Cette dernière n'aurait même pas du suivre Ashka jusqu'ici. Elle allait l'anéantir comme elle avait anéanti tous les autres. Quatre minutes.

Soudain, un sentiment de colère prit la Hanson. Elle s'était mise dans cette situation seule. Elle avait refusé toute aide extérieure et maintenant, elle ne pouvait plus accepter. Les services de sa mère allaient débarquer et l'embarquer. Mais qu'en serait-il de Mia ? La Lorder Jannings serait-elle épargnée ? Ashka souffla lentement, prise d'un mal de crâne incontrôlable.

Non. Je refuse. Tu dois partir.

Ashka posa ses coudes sur ses genoux en se prenant la tête entre les mains. Trois minutes. Un jour, le temps allait l'achever. Pourquoi ne pouvait-on pas l'arrêter ?

Des bruits commençaient à se faire entendre à l'extérieur de l'appartement. L'immeuble était ancien, nous pouvions tout entendre. Pourtant, ce bruit n'était pas semblable à ceux de d'habitude. Des bruits de pas effrénés, les marches de l'escalier bien plus grinçantes qu'à l'ordinaire. Ashka se leva immédiatement et se dirigea vers le centre de l'appartement, près de la porte. Elle se tourna vers son ancienne professeure.

Toi comme moi savons qu'ils sont là pour moi. Tu n'as plus rien à faire ici, je t'en supplie, vas-t-en.

La Hanson avait presque crié ses dernières paroles, comme une supplication dans la voix. Deux minutes. La porte s'enfonce, Ashka se retourne avant de pouvoir voir qui était entré. Elle ne voulait même pas le savoir. La jeune femme observa Mia. Il était trop tard. Une minute.

Une voix s'éleva. C'était terminé.

30 secondes.

La peur. L’abandon. Les cris. Le temps. Oui, il était compté. Bien trop précisément. Qu’elle s’en aille, qu’elle fuie, mais qu’elle ne reste pas. Ashka regardait Mia, les larmes commençant à couler sur ses joues. Est-ce que ça allait juste se terminer comme ça ? Car les deux femmes étaient bien trop égoïstes pour ne pas laisser tomber l’autre et sauver sa peau ? Mia voulait sauver Ashka, et Ashka ne voulait pas tuer Mia. A partir de là, tout devenait compliqué.

La Hanson s’était approchée de la porte, posant ses mains à plat sur le bois de l’ouverture. Voilà qu’elle ne pouvait même plus regarder son ancienne professeure dans les yeux. Sa voix devenait fragile, ses yeux embourbés par les larmes. Ashka refusait d’imaginer ce qu’il se passerait pour Mia si elle restait, si elle essayait de la sauver.

Laisse-moi.

Le temps défilait bien trop vite, et ce depuis toujours. Est-ce que ça s’arrêterait un jour ? Que se passera-t-il quand elle décidera de s’abandonner au vide ? Les pas se rapprochaient de l’appartement, Ashka posa sa tête contre la porte. Une minute. Soudain, la voix de la Lorder Jannings s’éleva une nouvelle fois. La sorcière la regarda, en secouant faiblement la tête de droite à gauche. C’était déplorable. Cette situation-même l’était bien trop. L’esprit embrumé, Ashka ne chercha plus à savoir quoi faire. Elle entendait les cris de son amie, et les russes tenter de forcer la porte. Ashka n’avait jamais cru au dernier espoir, pourtant il se présentait, sous une forme peu commune.

L’ancienne Serdaigle attrapa la main de Mia, incapable de penser. Le temps continuait à défiler sans qu’elle ne puisse rien y faire. En s’éloignant de la porte, elle avait laissé une femme pénétrer à l’intérieur de l’appartement. Dix secondes. C’était si peu, mais à la fois amplement assez. Ashka sentait son estomac partir dans le tourbillon créé par Mia. Elle sentait aussi une présence inconnue à la surface de son ventre. A la surface ? Une seconde.

Dire qu’elle avait cru s’en sortir. Ashka ne reconnaissait pas le petit endroit où les deux femmes où se trouvaient mais elle s’en moquait complètement. Elle se laissa tomber sur le sol, le poignard enfoncé dans le ventre. Tout ça pour ça ? La jeune femme ne connaissait pas la douleur. Elle connaissait simplement la souffrance. Elle ne reconnaissait aucune émotion. Elle n’était ni triste, ni en colère. Étonnement, elle était même plutôt sereine. Malheureusement, son état physique disait tout le contraire. Les larmes continuaient de couler sur ses joues alors qu’elle hurlait. Comment le physique et le mental pouvaient-ils être si contradictoires ? La Hanson attrapa faiblement la main de Mia. Était-elle condamnée à souffrir ainsi toute sa vie ? Elle refusait de vivre dans ces conditions.

Je ne peux plus.

Alors, c’était bien ça. Tuée par sa voisine, un retournement de situation comme vous n’en aviez jamais vu. Finir l’acte en beauté, voilà ce qu’il se passait.

Ne me laisse pas crever de douleur.

Elle n’aura jamais pu dire adieu à ceux qu’elle avait aimés. C’était peut-être mieux ainsi.

Finis-en juste. S'il-te-plaît.

La douleur et la peur. Voilà deux choses que Ashka n’aurait jamais cru ressentir aussi intensément au cours de sa vie, et encore moins en même temps. Sa main serrée dans celle de Mia, la jeune femme sentait les dernières larmes de son corps couler. Elle observait le visage de la Lorder Jannings, sans plus aucune émotion dans le regard. Ses bras s’étaient refermés sur la jeune adulte. Ce n’était qu’un au revoir.

Bien sûr que tu le peux.

Le poignard fut retiré d’un coup sec, le sang coulant à flot sur le corps d’Ashka. Cette dernière hurla en se débattant dans les bras de Mia l’espace d’un instant. Non, elle devait se montrer forte. Au moins pour son amie. La douleur & la souffrance. La Hanson s’agrippa à la main de son ancienne professeure alors qu’elle retirait le sang d’un tergeo. La jeune femme se calma peu à peu. Elle n’avait jamais été très bonne en sortilèges, heureusement pourtant que des gens savaient y faire.

Ashka voyait le bout. La porte au bout du tunnel. Qu’est-ce qui l’attendait, là-bas ? La jeune femme avait toujours refusé de croire à quoi que ce soit, de peur d’être déçue. Était-ce pour ça que sa vie avait été si calculée ? Au millimètre près, tout était prévu. Ça ne pouvait pas être une vie normale. Elle avait tout foiré. De A à Z. Même sa fin ressemblait à un carnage sans nom. Tuée par Mia Lorder Jannings, entourés de ces papillons qui l’avaient hantée toute son existence. Bien sûr qu’elle l’aimait aussi. Pourtant, Ashka ne savait pas mettre de mots sur ses émotions.

Ne t’en vas pas tout de suite… Retrouve Jessica…

Phrases contraires, deux étoiles en haut de la constellation. Si Ashka n’avait pas pu avoir une vie convenable, elle refusait que ses amies subissent le même sort. Elles pouvaient le faire. Soudain, ce n’est plus le silence paisible qui prenait toute la place dans le coeur dans des femmes, mais un cri. Un cri et des paillettes. Les pensées de la Hanson s’arrêtèrent net. C’était terminé.

Le vide. C’était juste ça, la fin ? On ne pouvait plus parler de page qui se tournait. Pourtant, il s’agissait bel et bien de la fin du livre. Ce n’était pas seulement la fin de l’acte, mais aussi la fin de la pièce. On disait souvent que la fin était synonyme du début d’une nouvelle ère. C’était peut-être le cas, mais Ashka ne ferait pas partie de cette dernière. En effet, Mia était destinée à jouer pour deux le reste de sa vie. Souvent, on associait la mort à un arrêt brusque. Dans ce cas, pourquoi les livres avaient un terme ? Ça n’existait pas, un livre s’arrêtant au beau milieu d’une phrase. Ça devrait, pourtant. Signifier l’achèvement devenait de plus en plus compliqué.

On parlait souvent de la fin en général, mais pas de la mort. C’était fou comme un mot pouvait effrayer tant de gens. Ashka n’avait pas peur de la mort, elle avait peur de la vie. Tout ressemblait à un cycle sans issue. Mais pourquoi ? Pourquoi devait-il y avoir une fin à quelque chose que nous n’avions pas demandé ? Après tout, même les personnes les plus heureuses du monde n’avaient pas désiré naître. La vie était un cadeau empoisonné, et la mort son terme sans pitié.

Ashka refusait de croire au recommencement. Recommencer signifierait effacer toute chance de fin, et la fin était son seul espoir d’échappement. Peut-être était-ce un rêve. Un rêve long et triste. Un rêve dans lequel le temps lui courrait après, sans s’arrêter. Oui, c’était sans doute ça. Un songe qui lui permettrait de s’évader. La finition parfaite.

La porte de lumière était de plus en plus proche. Dans son rêve, Ashka marchait le long du tunnel. Elle ignorait ce qu’il se passait dans le monde de Mia, mais elle s’en moquait. Sa main suivait la paroi du couloir jusqu’à ce qu’elle s’arrête. Dans quelques secondes, ce serait terminé. Pour de bon, cette fois-ci. La grande enfant se retourna sans rien voir. Son sourire d’espoir s’effaça légèrement. Elle avait espéré voir son amie une dernière fois, mais en vain. Elle avait fait son temps. C’était terminé. Et elle s’aventura dans le trou de lumière.

Fin + 10 secondes.

Jessica. Jessica. Jessica. Il fallait qu'elle retrouve Jessica. Elle tenta de se relever mais chancela. Comment pouvait-elle prétendre retrouver la colocataire et amie d'Ashka si elle n'était même pas capable de tenir sur ses jambes ? Oh, Jessica... Pardon, Pardon. Mia sanglota et essaya, à nouveau, de se tenir droite sur ses jambes. Elle avait fait ce qu'il y avait à faire. Il n'y avait pas d'autre possibilité. Un ange passa, sans que la blonde ne se décide à partir. Et si elle restait là, près d'Ashka, à tout jamais ? Peut-être finirait-elle même pas la rejoindre...

Ils allaient la traquer, c'était une certitude. Même si sa fille était morte, Volvia n'aurait satisfaction que lorsqu'elle aurait obtenu ce qu'elle désirait. Mais d'ailleurs, le parchemin n'était-il pas dans le manteau de sa protégée ? Foutu parchemin. Il avait causé la perte d'Ashka et causerait certainement sa perte. Tant pis. La Lorder Jannings allait se battre. Elle n'avait pas le choix. L'ancienne photographe le devait à la Hanson. Elle le devait à sa conscience. A James. A tout ceux pour qui elle n'avait pas été assez forte. A tout ceux qu'elle n'avait pas réussit à sauver.


La sorcière fit glisser la fermeture éclair du blouson couleur corail de son ancienne élève. Le visage toujours ravagé par les larmes, elle ne put s'empêcher de penser que le corail ETAIT la couleur préférée d'Ashka. Qu'elle l'avait toujours trouvé rassurante, chaleureuse. Et puis la jeune femme réalisa qu'elle avait pensé à son amie au passé. De gros sanglots étouffés se firent alors entendre, résonnant douloureusement contre les murs de l'immeuble désaffecté. Mia attrapa le morceau de parchemin froissé et le fourra dans la poche de sa cape de voyage. C'était sa faute. La faute à ce foutu papier. Une envie irrépressible de le brûler d'un sortilège étreignit l'Anglaise, mêlé à une rage immense. Mais non. Il y avait mieux à faire, quelque chose de plus intelligent. Mais en aurait-elle seulement la force ?

Après les pleurs vint le constat. Ils allaient l'arrêter. Ils allaient la mettre à Azkaban. Après tout, elle l'avait mérité. Mais il fallait que Mia gagne du temps, qu'elle les sème. Elle devait faire des choses, avant de perdre son âme entre les murs froids de cette prison qu'elle ne redoutait plus tant que ça. Du temps... Elle avait irrémédiablement besoin de temps, pour s'assurer que ses proches n'étaient pas tous morts pour rien.

La blonde jeta un dernier regard à Ashka et prononça mentalement une formule d'excuse. Pas pour son meutre, cette fois-ci mais pour ce qu'elle s'apprêtait à faire. Mia ne le savait pas encore mais ce n'était-là que le début d'un chapitre, le début de sa Vendetta contre le CAMP. Sa baguette dans la main, elle réitéra sa promesse au cadavre qui gisait à ses pieds. Ils payeraient. Tous. Jusqu'au dernier.

Un serpent de feu apparut, symbole même du désespoir habitant la jeune femme. L'animal semblait d'ailleurs se nourrir de ce sentiment puissant, de cette tristesse infinie. Lorsqu'il eu atteint une taille énorme, il se détacha de la baguette de Mia et se précipita vers le petit corps d'Ashka. Face à cet affreux spectacle, la journaliste prit ses jambes à son cou et déguerpit, incapable de soutenir cette vision d'horreur. Elle prit simplement le temps de vérifier que ses papillons magique résistaient aux flammes. S'ils venaient à disparaitre, ce serait 19 ans de vie rayées de la carte. Et ça, Mia ne pouvait le tolérer. Un décors entre noirceur du feu et beauté volatile de l'insecte, c'était là bien tout ce qu'elle pouvait offrir à Ashka. Ainsi qu'une vengeance totale, complète et dévastatrice.


Une sorcière entra dans la pièce, un élégant OpenSpace où quelques personnes s'activent dans un joyeux brouhaha. On entendait e bruit étouffé de conversation, le léger cliquetis des machines à taper et le ronronnement d'une cafetière. La jeune blonde aux sourcils impeccables et à la démarche chaloupée se dirigea droit vers un bureau en chêne plus de toute première jeunesse et rédigea une note manuscrite à la va-vite. Elle la plia en forme d'avion et le lança à travers les airs. Contrairement à ceux fabriqué par les moldus, cet avion là ce mit à planer et fonça droit en direction des Archives de la Cours de Justice Magique.

Avant que la femme, qui n'était autre que Mia, ne puisse explorer ledit rapport, un toussotement sec se fit entendre. Elle releva sa tête bien faite et dévisagea une jeune femme, d'une vingtaine d'année. Sans lui prêter uen grande attention, elle jeta désinvoltement :

Summer Pearson était debout dans le Hall d'entrée du Ministère de la Magie. Du haut de ses 23 ans, elle était légèrement sur les nerfs. La jeune femme n'arrêtait pas de tirer sur les pans de sa robe, en observant l'activité autour d'elle. Tous ces gens qui semblaient parfaitement savoir où aller, ça l'effrayait légèrement. Voilà deux mois que Summer avait été recrutée en tant que nouvelle formatrice d'Occlumancie. Si son bureau se trouvait dans les locaux du Ministère, elle savait qu'elle devrait essentiellement travailler à Poudlard, dorénavant. Tout cela allait la changer de son quotidien banal aux Trois-Balais. Ainsi, se retrouver de la sorte au Ministère, c'était étrange et légèrement angoissant.

Depuis cette rentrée, tant de nouvelles choses étaient arrivées dans sa vie. Ce poste avait chamboulé toutes ses habitudes de travail. C'était néanmoins une occasion à prendre, et Summer était persuadée d'avoir bien fait. On en revenait néanmoins toujours au même point. Summer Pearson était debout dans le Hall du Ministère, pétrifiée, et incapable de bouger. On la bouscula plusieurs fois avant qu'elle ne réagisse. Un homme vêtu complètement de noir l'attrapa par le poignet, et l'entraîna dans un ascenseur, pas très rempli, au contraire de nombreux autres. Essoufflé, il ne prit même pas la peine de se présenter, reprenant simplement ses esprits, appuyé contre une paroi de l’élévateur. Complètement perturbée par les événements, Pearson n'osa pas prononcer un mot, attendant que les choses se passent. Une voix se fit attendre, annonçant le niveau 3. Quelques personnes sortirent, et l'homme se tourna enfin vers Summer.

Excusez ma mal-politesse, je devais trouver une solution. Je vous annonce promue au rang d'assistante de Mia Lorder Jannings. Vous passerez la semaine avec elle.

Alors que Summer écarquillait les yeux, l'homme reprit.

Madame m'avait demandé de chercher une certaine personne, et je ne l'ai pas trouvée, je vous demande pardon, vous êtes ma dernière chance.

De ne pas se faire virer ? C'était certain.

- Mais... Je dois rejoindre mon nouveau bureau, et...

- Pas le temps, on y est.

La voix s'éleva à nouveau, annonçant leur arrivée au niveau 2, l'étage du département de la justice. La jeune femme suivit son instructeur dans le couloir, jusqu'à un bureau.

Oh d'ailleurs. Son café préféré est celui à la noisette supplément chantilly. Bonne chance.

La porte s'ouvrit sur le visage qui devait être celui de Mia Lorder Jannings. Summer était légèrement perdue face à tant d'événements. Être l'assistante d'une femme à l'allure si peu chaleureuse allait s'annoncer sympathique. Avant que Pearson ne puisse se retourner, l'homme en noir était reparti. L'Occlumancie allait apparemment devoir attendre.

Bonjour à vous aussi.

Toujours pas de salutation de la part de celle qui, apparemment donc, allait être sa boss pour la semaine. Impeccable. C'était dans ce genre de moments que Summer se demandait ce qu'elle avait bien pu faire au destin pour se retrouver dans de telles situations. Si elle arrivait à canaliser son esprit, cela ne voulait pas dire qu'elle ne se posait pas de questions. Très peu à l'aise, le visage inexpressif, la jeune femme rangea ses mains dans les poches de son long manteau dont les pans retombaient lourdement sur sa robe. Elle s'était si bien préparée le matin-même, prête à faire bonne impression pour découvrir ses nouveaux locaux au Ministère, et c'est comme si tout cela n'avait servi à rien. La formatrice sentait chaque cheveu tiré dans son chignon lui faire mal, ses bottes frotter désagréablement contre ses genoux ou encore la chaleur insupportable que provoquait son manteau noir sur son corps.

Malgré tout, elle ne semblait pas avoir d'autre choix que de suivre la Lorder Jannings. Le couloir que les deux femmes s'apprêtaient à emprunter semblait très long, ainsi Summer était prête à l'utiliser pour maudire l'homme de l'ascenseur tout le long. Elle n'en eut néanmoins pas l'occasion puisque sa nouvelle collègue avait commencé à parler, sans réellement avoir la volonté de s'arrêter. Tout en marchant derrière celle-ci, Summer découvrit ainsi qu'elle allait être confrontée à une enquête. Bien qu'elle aurait pu s'en douter, cela la prit légèrement de cours, voilà encore quelque chose. Et en plus de tout cela, il s'agissait d'une enquête de niveau 2 ? L'Américaine était légèrement perturbée, elle s'agrippa à sa baguette dans sa poche droite pour éviter de chanceler, et lorsqu'elle releva la tête, elle croisa les yeux de Mia. Ne sachant pas réellement quoi affirmer, la serveuse hocha la tête de haut en bas. Ce n'est pas comme si elle était en position de négocier.

Summer avait à peine pris conscience qu'elle n'allait certainement pas compter les mouches pendant cette semaine que Mia était déjà repartie. Elle accéléra le pas pour la rattraper et plissa les yeux pour regarder devant elle. Ce couloir n'en finissait décidément pas. Au même moment, l'Auror venait de prononcer les mots qui venaient de faire regretter pour de bon Pearson d'être montée dans cet ascenseur à ce moment précis. Des enquêtes dont personne ne veut ? Elle non plus n'en veut pas ! Et voilà qu'en plus, elle lui demandait son avis.

Pas mal, en effet.

Jouer l'hypocrite n'avait jamais mené à rien, elle devrait le savoir, depuis le temps. Pourtant non, Summer était toujours persuadée que cela la sortira d'un mauvais pétrin un jour. Peut-être un jour, mais certainement pas aujourd'hui en tout cas. La blonde sursauta quand Mia vira brutalement à gauche. Pearson resta en retrait alors que l'Auror fouillait dans le placard plongé dans la pénombre, tout en continuant son explication. Encore heureux qu'elle n'était pas concernée par le niveau Dragon, tiens donc, il ne manquerait plus que ça. Encore une fois mal à l'aise, Summer passa ses doigts derrière ses oreilles pour replacer des mèches de cheveux - imaginaires tellement elles étaient plaquées sur son crâne -. Cette matinée semblait aller de pire en pire. Voilà à présent que la Lorder Jannings avait sorti un panneau du cagibi sur lequel elle s'activait à accrocher des documents de sa dite enquête. C'était bien réel, alors. Deux femmes, un homme. Est-ce que celle-là était en prison ? Sans s'en rendre compte, la formatrice s'était légèrement rapprochée du tableau, scrutant chaque détail. C'était à rien n'y comprendre. Est-ce que Mia comptait au moins lui expliquer quelque chose de tout cela ? La voix de cette dernière résonna alors soudainement ; Summer sentit son cœur faire un bond et se tourna lentement vers son interlocutrice. Elle l'avait presque oubliée.

Pardon ? Oui.

Elle avait osé penser que Mia Lorder Jannings était impolie alors qu'elle ne s'était même pas présentée elle-même, quel drôle de moment...

Pearson ! Summer.

Est-ce que l'Auror jouait aussi au Quidditch ? C'était curieux comme question. Mais c'était aussi probablement mal vu de retourner la demande. Pourtant, elle a tout autant de carrure. La même que Angele, à l'époque.

Il y a quelques années, oui. J'ai malheureusement arrêté en revenant en Europe. J'ai mené l'équipe de Serdaigle en tant que poursuiveuse, et joué quelques années dans l'équipe texane.

Qu'est-ce qu'elle devait se moquer de tout ça, ça devenait très embarrassant. Pourtant, en en reparlant, l'ancienne Capitaine regrettait de ne pas avoir continué. Cela devait faire trois ans qu'elle n'avait plus joué, mais son rêve était resté intact. Peut-être qu'un jour, elle s'y remettrait.

Vous avez aussi fait partie de l'équipe de votre maison à Poudlard ?