En quelques secondes Hazel sembla perdre ses moyens. Elle mit un tel branlebas de combat avant de partir comme une flèche que ses paroles ne semblaient pas prononcées dans le bon ordre. Face au regard désespéré d'Avise, entre deux gorgées, Hope murmura.

« Complètement ravagée.. »

Le calme envahit de nouveau le manoir. Il était définitivement bien trop grand pour seulement deux sorcières.

Hope donna quelques indications à l'elfe sur ses tâches de la journée avant de prendre la direction du jardin. Elle y passa le reste de la matinée, pioche en main. Aux alentours de 13h Avise l'invita à rentrer prendre son repas. Reconnaissante, elle la remercia avant d'engloutir les délicieux plats préparés. Il lui restait environ 1h avant de devoir se rendre à Poudlard et beaucoup de terre à enlever sur sa peau. Hope monta l'escalier et traversa le couloir qui menait à la salle de bain quand elle s'arrêta soudainement et revint en arrière. La porte du bureau d'Hazel, habituellement fermée à clé, avait été laissée ouverte.

Attraper la poignée et fermer la porte, c'est ce qu'elle aurait du faire. Mais sa curiosité avait toujours été un vilain défaut et elle ne put s'empêcher de pousser un peu plus le battant avant de pénétrer dans la pièce qui sentait beaucoup trop le renfermé à son goût. La première chose qu'elle fit fut donc de se diriger vers la fenêtre, qu'elle ouvrit en grand pour laisser entrer une brise bienvenue et aérer les lieux.

Elle s'intéressa ensuite aux bibliothèques, fourmillant de bouquin à en faire craquer les étagères. De nombreux titres lui étaient inconnus, dans des langues parfois oubliées. Elle reconnut une carte partiellement dépliée de la Nouvelle-Orléan dans un coin, et des objets tribaux, semblait-il. Hope détourna bien vite le regard, une chair de poule naissante sur les bras, pas seulement due à l'air qui entrait librement par la fenêtre ouverte. Le bureau fut donc sa prochaine cible. Il était installé dans la partie la plus sombre de la pièce, tant et si bien qu'elle n'avait pas remarquée ce qui était installé sur celui-ci.

Les sourcils froncés, la jeune femme observa les marques tracées sur le bois, entourées de bougies éteintes. Sur le côté, une petite dague ensanglantées gisait. Hope s'assit sur le fauteuil de sa compagne et se mit à fouiller. En ouvrant le premier tiroir, elle y découvrit des poupées vaudou. Les autres étaient remplis de documents qu'elle ne comprit pas, de cartes et de notes qu'elle éparpilla sur les marques. Elle aperçut plusieurs fois le nom de Dambala. Une histoire de pouvoirs et d'héritage. Son regard se perdit sur le reste du bureau, où elle remarqua un cadre auquel elle n'avait pas fait attention. Dans celui-ci on pouvait apercevoir une femme d'âge mur portant dans ses bras un petit enfant. Elle le reconnut facilement, ayant vu de nombreuses photos d'Hazel bébé. Mais la femme.. Cette même femme qui arborait sur les bras les signes qui étaient tracés sur le bureau.

Hazel lui cachait donc beaucoup plus que ce qu'elle ne pensait. Elle fit pivoter le fauteuil vers la vitrine derrière elle, qu'elle tenta d'ouvrir. Les parois ne bougèrent pas. Sortant sa baguette, elle lança alors le sortilège Alohomora. Encore une fois, ce ne fut pas efficace. Bien décidée à découvrir pourquoi cette vitrine était aussi difficile à ouvrir que le coeur de Camille Dubois, Hope appela son elfe de maison.

« Avise ! Amène moi le pied de biche. Et préviens Izora que je prend ma journée. »

L'après-midi passa trop vite à son goût. Quand la jeune femme entendis la lourde porte d'entrée s'ouvrir, annonçant l'arrivée d'Hazel, elle observait le carnage qu'elle avait perpétré dans la pièce. L'armoire derrière elle était éventrée. Le meuble du bureau quant à lui était méconnaissable. Un cochon n'y retrouverais pas ses petits.

C'est la voix de sa compagne qui la fit se retourner dans le fauteuil, le pendentif qu'elle avait trouvé dans l'armoire pendouillant à sa main droite, le pied de biche bien ancré dans sa main gauche.

« Bonsoir chérie. Elle désigna le bureau. Tu m'expliques ? Parce que j'ai du passer un bon quart d'heure à démonter ce foutu meuble pour trouver tout un tas d'objets abjects de magie noire et de vaudou. Et il y avait aussi ce collier. Qu'on peux voir autour du coup de la femme en photo avec toi ici dit-elle en pointant la photo avec le pied de biche. Une femme dont les bras sont tatoués des mêmes symboles présents sur ce bureau. Celui-ci même où tu t'es enfermée cette nuit à cause d'une insomnie. Elle planta un regard noir, sans expression dans le visage d'Hazel. Mais dites-moi, madame De Martel, vous avez finis de vous ficher allègrement de moi ? Ou est-ce que je dois mettre le feu à ce fichu bureau pour enfin savoir ce qu'il se passe dans ma propre maison ? »

Dehors, le temps virait à l'orage et de nombreux éclairs zébraient le ciel, attirés par la magie qui commençait à crépiter sous les ongles de l'ancienne Poufsouffle.

D'ordinaire si calme, les yeux de la De Martel étaient emplis de diverses émotions. Peur ? Dégoût ? Colère ? Elle n'aurait su dire. Toujours était-il que la jeune femme ne l'avait jamais vu dans un état pareil auparavant. Elle resta fixée quelques instants devant la porte, admirant le massacre qu'Hope avait commis dans son bureau. Enfin, pouvait-on vraiment appeler ça un massacre quand elle n'y avait mis que 20% de son énergie. Hope fit tourner quelque peu la chaise du bureau avant de se lever, emportant avec elle le collier qu'elle tenait toujours en main. Voilà maintenant qu'elle était coupable de rétention de courrier. Non, la situation devait cesser.

« Mais tu dérailles complètement ma pau... Hope se stoppa net en entendant la De Martel utiliser le fourchelang. Un secret de plus. Et ça aussi tu comptais un jour m'en parler ? Au détour d'une brioche au petit-déjeuner peut-être ? Mais BORDEL Hazel. Bientôt 10 années que nous sommes ensemble et tu n'as pas pensé une seule fois à me dire que tu avait le don du fourchelang ? Pas une seule fois tu n'as trouvé l'occasion d'aborder le sujet de ces.. choses ! Depuis combien de temps ça dure hein ?! »

Dans sa main, le pendentif le métal du pendentif se mot à rougir, témoin de la colère de la jeune femme qui commençait à se déverser à l'intérieur.

Hope n'en croyait pas ses oreilles. Comment avait-elle pu être aussi aveugle toutes ces années ? Tout ce temps où elle avait acquiescer aux mensonges que la jeune femme lui avait servit lors de ses soirées à travailler tard dans son bureau. Ses nombreuses insomnies en étaient-elles ou seulement un moyen de cacher ses vagabondages ?

« Alors je t'ai bêtement crue quand tu me disais que j'étais la personne la plus importante à tes yeux. Que tu me disait tout, même tes plus sombres secrets. Me mentais-tu à moi ou à toi-même ? »

Le ton accusateur d'Hazel lui transperça la poitrine. Comme si toute cette situation finissait par être sa faute. Elle n'aurait pas du aller fouiner dans son bureau, mais sa compagne n'aurait pas du lui cacher un si gros secret. 10 années de vie commune, des projets d'avenir. Un mariage dans les mois qui allaient suivre et des discussions plus qu'entamées sur le fait de fonder leur famille. Voilà où elles en étaient à présent.

Devait-elle accepter la situation sans broncher, comme le prétendais Hazel ? Car elle, n'avait jamais porté de masque. Elle était un livre ouvert pour sa compagne, qui connaissait tous les aspects de sa vie, du moment où elle avait mis fin à la vie de sa petite soeur à ses déboires d'adolescente dans le Manoir Dubois, à la recherche d'un semblant de contrôle sur sa magie.

Le regard de la jeune femme passa en revue l'état de la pièce. Oui, elle s'était quelque peu laissée aller. Le contrôle de sa magie n'était pas quelque chose qui lui était inné, mais qu'elle avait développé aux côtés de Camille pendant ses longues années de tutorat. Mais parfois, lorsque l'émotion était trop forte, qu'elle soit heureuse ou non, la part d'elle-même qui était en contrôle partait se recroqueviller dans un coin pour laisser libre court à sa magie. Une brûlure dans sa paume la ramena à la réalité. Le pendentif qu'elle avait en main rougeoyait et venait de la brûler. Elle le lâcha brusquement avant de répondre, la voix éraillée.

« Baigne toi dans tes mensonges alors Hazel. Mais baignes toi-y seule. »

Retenant ses larmes, elle enleva la bague qui ornait son annulaire gauche et la posa sur le bureau avant de quitter la pièce et de transplaner hors du manoir. Pour de bon, cette fois-ci.

Les journées s’étaient suivies sur le même schéma pendant dans longues semaines. Réveil, pleurs, boulot, pleurs, dîner, pleurs. Et puis un soir elle avait rencontré un beau brun ténébreux. Sa routine avait été bouleversée, ses crises de larmes diminuées et son temps libre accaparé.

En quittant le manoir de Kylemore Hill à la hâte, Hope n’avait pas eu d’endroit où aller. Elle avait oscillé pendant les 5 derniers mois entre son dortoir à Poudlard, celui d’un adjoint particulièrement séduisant et une chambre que Sam lui louait aux Trois-Balais. Elle avait lancé la réparation de son manoir familial, laissé à l’abandon au décès de ses parents. Les travaux s’étaient terminés quelques jours plus tôt et la jeune femme était en plein aménagement. Il ne lui restait qu’une chose à faire : récupérer ses vieilles affaires.

Même si elle n’évitait pas spécialement la De Martel, cela faisait quelques temps qu’elle ne l’avait pas aperçue à Poudlard. Peut-être était-elle en déplacement ? C’était le moment parfait. Hope s’habilla à la hâte, cachant avec précision le petit bout de ventre qui commençait à se montrer sous sa tunique et transplana jusqu’aux falaises irlandaises.


Les jardins de la résidence faisaient pâle figure. Il ne semblaient pas avoir été entretenus, tout comme la facade de la maison, depuis de nombreuses semaines. Cela ne ressemblait pas à Avisé, qui s’était toujours donné la mission de tenir la maisonnée tirée à quatre épingles. Arrivée sur le perron, Hope farfouilla dans la poche de son blazer où elle avait enfoncé à la hâte le double des clés de la maison que Hazel lui avait fait confectionner. Elle glissa la plus grande dans la serrure au moment où la porte s’ouvrit dans un grand fracas, dévoilant l’elfe de la famille, le regard sévère.

« Avise ! Bonjour.. Elle offrit un sourire timide à l’elfe de maison. Je sais que je n’aurais pas du utiliser ma clé, prends là. Je suis seulement là pour récupérer mes affaires. Son regard s’arrêta sur les pièces attenantes au hall, dont la quasi totalité des meubles étaient recouverts de draps. Que s’est-il passé ici ? »

La possibilité de croiser son ex compagne n’était pas nulle, mais elle avait fait en sorte que la jeune femme soit occupée avant de venir au manoir. Son cœur tambourina dans sa poitrine quand elle croisa le regard de la De Martel qui, bien qu’elle fasse bonne mesure dans les couloirs du château, arborait une mine fatiguée. On voyait très largement qu’elle avait perdu de trop nombreux kilos et l’état du salon laissait entendre la suite.. Elle se tritura les mains, nerveuse.

« Hazel. Je te pensais en réunion chez les Gardiens. Je venais juste.. Un haut le cœur la saisit. Je venais.. »

Son estomac décida de la trahir et elle se hâta d’aller déverser le contenu de celui-ci dans les toilettes de l’entrée. Est-ce que l’enfant qu’elle portait avait décidé de jouer au bowling avec ses organes, ou le stress de revoir son ex-compagne l’avait rendu fébrile ? Elle n’aurait su le dire, mais elle passa quelques minutes assise sur le carrelage froid, avant de ressortir et d’essuyer une larme.

« Eh bien, il semblerait que je ne digère toujours pas la cuisine des elfes de Camille. J’aurais du m’en doûter. Elle offrit à la jeune femme un sourire timide, le plus sincère qu’elle pu, avant de changer de sujet. Tu refais la décoration ? Parce que si c’est le cas, ce n’est pas des plus réussi. »

Le regard inquisiteur d'Hazel la mettait mal à l'aise. Seuls Camille et Erwan étaient au courant de sa condition, et elle comptait bien garder ce nombre intact. Du moins, jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus le camoufler.

« Oui, en effet. J'ai oublié mon matériel de peinture dans la véranda. Je ne te dérangerais pas longtemps. »

Son coeur battait vite. Elle avait chaud. Et besoin de s'asseoir. Hope jeta un oeil vers le grand escalier, évaluant la proposition de la De Martel. Un verre d'eau lui ferait le plus grand bien et lui permettrait de se calmer. Les médecins de Ste-Mangouste engagés par Camille avaient étés clair. Avec l'héritage qui coulait dans ses veines, porter un enfant aller dérégler ses pouvoirs, à tel point qu'un simple pic de stress pourrait faire d'horribles dégats.

Lentement, Hope composa un sourire poli sur son visage. Elle ne lui dirait rien. Pour le moment. Mais elle pouvait s'attarder. Quelques minutes au moins.

« Volontiers. Un grand verre d'eau fraîche ne me fera pas de mal. Et de l'air aussi. Toi qui a l'habitude de tout laisser ouvert, j'imagine que l'étage est balayé par les courants d'air. »

Et elle lui emboita le pas, nerveuse.

Hope ne se fit pas prier pour se diriger vers les grandes baies vitrées ouvertes. On pouvait observer tous les jardins du Manoir et la ville en contrebas. Un spectacle dont elle ne s'était jamais lassée durant ses sessions de peinture mais dont elle devait aujourd'hui délibérément se détourner.

« Un verre d'eau bien fraîche fera l'affaire. Je ne veux pas contrarier mon estomac plus que de raison, n'est-ce pas ? »

Hope afficha un sourire penaud, feignant d'être encore sujette à ses précédents haut-le-coeur. C'est le moment que choisis Avise pour apparaître, un plateau de mignardises sucrées et salées à la main avant de disparaitre dans un "pouf" sonore.

Hope ramena son attention vers la De Martel qui la fixait avec insistance, cherchant un signe, quelque chose qui la trahirait, elle le sentait. Elle s'approcha de la petite table et s'installa dans un des fauteuil, prenant le soin de croiser les jambes pour cacher le petit renflement de son ventre.

L'odeur qui se dégageait du plateau en argent poli était des plus alléchante, et elle se servit de quelques douceur salées, remerciant Hazel pour le verre d'eau qui lui était offert. Elle finit par prendre un bonbon à la menthe, qu'elle fit rouler sous sa langue avec contentement, avant d'ajouter.

« Je suis vraiment très heureuse pour toi Hazel. Tu as travailler dur pour avoir cet examen et réaliser ton rêve. Mes plus sincères félicitations ! »

L'eau, qu'elle accueillait avec joie, se coinça dans sa gorge et elle manqua s'étouffer face à son ancienne compagne. Elle avait tout fait pour ne pas paraître suspecte. Elle s'était habillée assez ample, mentit de manière plutôt convaincante à son goût et pourtant, la De Martel semblait sentir le filon de vérité qui se cachait derrière cette petite mascarade. Alors elle tenta de nier.

« Mais enfin, qu'est-ce que tu racontes, je .. - Le regard que lui lança Hazel la dissuada de terminer sa phrase. - deux semaine. Je viens de rentrer dans mon second mois. »

Maintenant qu'elle n'avait plus réellement besoin de jouer la comédie, la jeune femme décroisa ses jambes et enleva son manteau. Il dévoila le petit collier de grossesse qu'elle avait récupérer dans les cartons d'affaire de sa mère et la toute petite bosse qui se profilait sous sa tunique. Elle avait quitté le Manoir et sa vie avec Hazel depuis près de 8 mois maintenant. Elle fréquentait Erwan depuis 6 mois et même si elle avait toujours fait attention, le destin en avait décidé autrement. Elle n'en avait d'ailleurs pas encore parlé au père, seulement à Camille, qui l'avait enjointe à emménager au Manoir Dubois et maintenant, à Hazel.

« Actuellement je ne te fais pas assez confiance pour te dévoiler son identité, tu m'excuseras. Elle marqua un temps d'attente, avant de continuer. Ce n'était pas prévu. Mais c'est arrivé. Et tu sais que j'ai toujours voulu être mère. Et ce n'était clairement pas la manière dont je voulais t'annoncer la chose. »

Hazel disait vrai. Elles se connaissaient toute les deux par coeur. C'est pour cette raison qu'elle compris rapidement que cette annonce forcée peinait la De Martel. À sa manière d'agir, au ton de sa voix. La jeune femme souffrait. Et elle souffrait de lui avoir fait du mal. Elle ne pouvait pas blâmer Hazel. Comment aurait-elle réagit si après plus de 5 années ensemble, elle l'avait vu refaire sa vie dans les bras d'une autre personne, quelques mois après leur rupture ? Mal, sûrement. Très mal même.

« Ne fais pas ça. Pas avec moi. Elle inspira doucement. Tu as besoin d'aide Hazel. »

Même si elle ne l'admettrais peut-être pas, tout en elle criait qu'elle n'était pas au meilleur de sa forme. La maison, dans un premier temps, n'était plus que l'ombre d'elle-même. Avise faisait sûrement de son mieux, mais il ne pouvait pas faire des miracles avec une maîtresse de maison fantôme. Hazel, quant à elle, ne donnait pas au change. Elle avait perdu beaucoup de poids, ce qu'elle essayait de cacher par un style vestimentaire assez inefficace. Ses traits étaient tirés, de profonds cernes avaient élus domicile sous ses yeux, qui avaient perdus leur éclat de vie. Et sa chevelure, qu'elle mettait toujours un point d'honneur à tenir impeccable, était dans un désordre organisé.

« Ne fais pas comme si tout ça t'intéressait. Jette moi tout ce que tu as à dire à la figure si ça te fais du bien. Mais ne reste pas comme ça. »