Les vacances en étaient déjà à leur deuxième semaine mais l'esprit de Noël était toujours aussi présent dans le château. Personne ne voulait se résoudre à enlever les décorations qui ornaient les murs et les sapins du château. Au dehors, la neige continuait à recouvrir de poudreuse le parc de Poudlard et quelques élèves s'étaient pris de passion pour le patinage sur le lac gelé. Pourtant, il n'y avait pas tellement d'élèves dans le domaine de l'école, la plupart des élèves étaient chez eux pour les fêtes de fin d'année ce qui laissait à Dylan l'occasion de se rendre dans la réserve de potions sans soupçons de la part de ses camarades.

Sa grande sœur venait tout juste de trouver un emploi dans la valise et elle avait préféré y rester, aussi, Dylan n'avait aucune raison de rentrer au manoir vide et dépourvu de cette ambiance festive. Cependant, le jeune garçon était un loup-garou et des dispositions étaient prises pour lui. Son professeur de potions qui avait l'amabilité de lui préparer une potion tue-loup chaque mois lui avait laissé un petit mot, lui indiquant qu'il pouvait aller la récupérer quand il le souhaitait dans sa réserve personnelle puisqu'il partait en vacances.

Sur ses gardes malgré tout, Dylan se rendit dans la réserve du professeur, cherchant des yeux la potion qu'il ne tarda pas à trouver.

Alors qu'il allait s'approcher de la potion bien en vue sur la table pour la mettre dans sa poche où un mot visant à remercier le professeur était déjà présent, Dylan s'interrompit dans son mouvement. Sans doute car une voix dans son dos le fit frissonner. Il était pourtant sensé être seul dans le couloir quand il était arrivé et il pensait avoir refermé la porte derrière lui. Mais ce n'était visiblement pas le cas. Fermant les yeux un instant, il réfléchit à la situation. Concrètement, il avait l'autorisation d'être dans ce lieu. Mais s'il en jugeait par la voix de la personne, c'était un adulte et il aurait bien du mal à justifier sa présence. Sauf si il lui expliquait la situation. Et dans ce cas-là, il devrait révéler son secret. Ou bien, il décidait de feindre la surprise.

Se retournant lentement pour découvrir la nouvelle personne présente dans la réserve, Dylan découvrit sur le seuil de la porte un jeune homme qui n'avait certainement pas dépassé la trentaine. Il avait l'air sympathique malgré son regard intimidant, se dit-il. Alors il sourit, d'un sourire charmeur et innocent comme il le faisait souvent pour se sortir de situations diverses. Mais le regard de l'homme était beaucoup trop insistant et le jeune garçon baissa alors le regard, peu habitué à cette situation. Peut-être que s'il baratinait l'homme...

Bonjour monsieur, je.. je suis ici pour récupérer une potion. Et j'ai eu l'autorisation du professeur. Je vous ai déjà vu ? Êtes-vous un professeur du château ?

En soit, Dylan n'avait pas menti, il était bel et bien autorisé à prendre cette potion dans la réserve. Mais très peu de personnes étaient au courant de la particularité du garçon et si cet homme le voyait prendre la potion.. il serait dans de beaux draps.

Pendant un instant, le sorcier ne dit rien. Pas un mot. Dylan redoutait le moment impitoyable qui arriverait, et il le savait, où il devrait révéler la nature de la potion. Mais il comptait d'abord sur ses questions. Ou plutôt sur les réponses que pourrait lui donner le sorcier. Il se fairait ensuite le plaisir de débuter une conversation. On lui avait toujours dit qu'il parlait trop. Le vrai contraire de sa sœur. Cependant, le sorcier n'en fit rien et il ne tint compte que de l'information sur la potion que lui avait donné le garçon. Consterné, Dylan ne pouvait que répondre à sa question qui se voulait précise. Il allait ouvrir la bouche quand son œil rencontra la potion juste à côté de celle qu'il convoitait : une potion de chance appelée aussi Felix Felicis. Il n'en avait jamais entendu parler, mais il pouvait facilement inventer quelque chose. Prêt à tout pour ne pas dévoiler sa lycanthropie, il n'avait cependant pas prévu quelque chose : s'il jouait avec le Felix, il ne pourrait prendre la tue-loup. Or, la pleine lune était pour le lendemain et il n'aurait la possibilité de la chercher à nouveau.

Du felix felicis, une potion qui porte chance ! Je l'ai gagné grâce à un pari contre mon professeur. Voyez-vous, j'avais parié sur l'équipe de Poufsouffle et lui sur Serdaigle.. Bon, au revoir monsieur, j'ai été ravi de vous rencontrer.

Et au dernier moment, il attrapa la potion tue-loup juste à côté et l'échangea avec celle de chance. La chance il allait en avoir besoin pourtant. Mais Dylan était rapide, il ne se faisait pas de soucis. Seulement, la porte de la réserve était verrouillée et il ne l'avait pas prévu.

Inspirant un bon coup, le jeune garçon se retourna lentement, la main toujours sur la potion. Il avait voulu jouer, il s'était fait attraper. C'était presque prévisible. Observant l'homme devant lui, Dylan commença à se poser quelques questions. Au début, il avait pû le trouver sympathique, rien que dans son apparence physique, mais plus il passait de temps avec lui, moins il était rassuré. Ce n'était pas un homme comme les autres, du moins comme ses professeurs. Il était glacé à l'intérieur et Dylan commençait à le ressentir. D'où venait-il ? Et que lui voulait-il ? Sûrement rien avant de le rencontrer mais maintenant qu'il connaissait son secret...

Je m'appelle Dylan. Et je suis à Poufsouffle. Mais vous, qui êtes-vous ?

Il avait envie de pleurer, son instinct lui disait qu'il était dans de beaux draps mais pas dans ceux auxquels il était habitué. Ce n'était pas une punition ou encore des heures de colles qu'il risquait de se prendre. L'homme ne lui disait plus rien qui vaille et il resta donc planté derrière la porte, à attendre. Il ne pouvait pas sortir et il était pris comme un rat.

Le sorcier paraissait étonné, sans doute par la maison dans laquelle se trouvait Dylan. C'était vrai qu'il était rusé et qu'il ne manquait pas de ressources. Mais le choixpeau en avait apparemment décidé autrement. Et Dylan était fier d'être à Poufsouffle, il suivait les traces de sa grande sœur qui avait toujours veillé sur lui, et ce depuis sa morsure des années auparavant. Et il était ravi de ne pas être dans la même maison que sa mère. Voilà que le sorcier lui parlait d'elle. Pouvait-il lire dans ses pensées ? Dylan ne savait même pas où elle était. Elle l'avait abandonné il y avait des années de cela. Mais il était hors de question que l'homme s'en mêle. Et Dylan avait appris à cacher de nombreuses choses à ses camarades, un vrai jeu d'enfant.

Laissez ma mère où elle est. Vous n'avez pas intérêt à toucher un seul de ses cheveux.

Plus les minutes passaient, plus il sentait la peur le quitter. Il reprenait du poil de la bête. Il savait que dans moins de vingt-quatre heures, il serait plus dangereux que cet homme. Du moins il le pensait. Quant à la pique que lui lança le sorcier sur sa potion, Dylan se contenta de lui adresser un regard noir. Quelle ironie ! Un peu surpris par la question suivante, Dylan s'aperçut cependant qu'il avait caché l'étiquette de sa main droite et il s'en réjouit un instant. Mais n'y tenant plus, il finit par lui balancer une remarque. De toute façon, le sorcier aurait bien su son secret tôt ou tard. Et vlan, dans ta face !

Vous savez pas lire ? C'est marqué sur l'étiquette !

Évidemment, il ne pensait rien de ce qu'il avait dit sur sa mère. Que le sorcier l'approche à moins d'un centimètre ne le dérangeait pas le moins du monde, il avait appris à vivre sans elle au moment où elle l'avait abandonné comme une vieille chaussette et c'était tout comme pour son père. Il choisit de ne rien répondre à l'homme qui essayait de l'intimider mais il devait avouer l'effet réussi. Il en aurait presque eu des frissons s'il tenait vraiment à sa mère. Alors il baissa les yeux une fois de plus, afin de satisfaire cet homme de moins en moins recommandable. Effectivement, ses parents ne lui avaient pas appris à être malpoli. Mais ils lui avaient appris quelque chose de bien plus utile : se débrouiller seul. Et quand la situation n'était pas toute limpide, le jeune garçon savait la ramener.

Je n'ai pas l'impression que les votre vous aient appris les bonnes manières également.

Quand il avait peur, Dylan répliquait. C'était un moyen comme un autre de contrôler ses émotions même si sa voix ne l'était pas toujours. Il laissa l'homme prendre la potion de ses mains, conscient que son secret était sur le point d'être découvert par un sorcier très peu honnête s'il jugeait sur les faits précédents.

Un loup-garou. C'est tout ce que je sais, nous n'avons jamais su de qui il s'agissait.

Il avait perdu son ton arrogant, comme toujours lors de l'évocation du sujet. Il était surtout peiné et las de son état. Il n'avait jamais pu faire quelque chose et à part prendre une potion tue-loup chaque mois pour calmer ses ardeurs, rien n'y changerait jamais.

Et zut. Dylan ne s'attendait pas à de telles révélations de la part de l'homme, certainement parce qu'il ne lui en avait donné aucune depuis le début de leur rencontre. Aucune information, aucune réponse à ses questions. Nada. Le garçon aurait presque fait une tête compatissante dans d'autres circonstances mais il ne voulait pas montrer une seule once de sympathie à un homme qui l'enfermait dans une réserve humide de potions. L'homme avait cependant raison sur un point, Dylan n'avait aucune excuse, ses parents lui avaient effectivement appris la politesse quand ils étaient encore aux petits soins pour lui et il ne pouvait les en blâmer.

C'est vrai, je n'ai pas d'excuse. Mais il y a une différence entre ce que nous apprennent nos parents et ce que nous faisons après. Donc je ne vois pas en quoi mes parents seraient tenus responsables de ma soit disant impolitesse.

Quand Dylan entendit la remarque du sorcier, il ne put s'empêcher de hausser les sourcils. En quoi une attaque de loup-garou pouvait être palpitante ? Il aurait bien aimé l'y voir, lui à cinq ans, se faire mordre par cette bête. Ce gars là était vraiment étrange, il cherchait absolument à trouver des informations sur le Poufsouffle. Ne pouvait-il pas juste le laisser partir avec sa potion ?

Euston. Dylan Euston.

Dylan avait donné son nom de famille au sorcier quand il le lui avait demandé et ne s'attendait pas à ce qu'il le connaisse. Il n'avait plus qu'une envie maintenant, sortir de cette réserve et fuir le plus loin possible de l'homme qui le retenait. Fuir jusqu'à ce qu'il se transforme. Mais les paroles de l'homme lui firent lever les yeux pour croiser le regard du sorcier, un peu étonné.

Vous connaissez Eloïse ? Et c'est ma sœur, pas ma mère, nan mais. Mais excellente idée, sortons un peu d'ici. Sinon, je peux aussi repartir dans ma salle commune..

Il ne comprenait pas pourquoi l'homme le retenait et il aurait bien voulu s'éloigner de lui. La potion toujours dans ses mains, il la rangea dans une des poches de sa cape pour ne pas la perdre et se tourna vers la porte, attendant impatiemment qu'elle s'ouvre pour sortir. Peut-être qu'il pourrait à nouveau s'échapper, aucune porte ne le retiendrait cette fois-ci.

Sortir d'ici, sortir d'ici, sortir. Mais qu'attendez le sorcier pour se bouger un peu ? Dylan commençait à en avoir ras le chapeau de cet endroit, déjà qu'il était synonyme de transformation imminente pour lui, il n'avait guère envie d'y rester plus longtemps surtout en aussi mauvaise compagnie.

Oh, vous savez, je la vois suffisamment pour ma part. Et je ne pense pas qu'elle sera ravie que vous m'ayez retenu dans cette réserve. Elle est assez.. protectrice me concernant si vous voyez ce que je veux dire.

Il avait beau s'exprimer intelligemment et paraître à l'aise, au fond, il ne savait pas de quoi cet homme était capable. De plus, il connaissait son secret et Dylan commençait à comprendre qu'il ne fallait pas trop jouer avec le feu. Au fond, il avait une peur bleue et il était bien content d'aller trouver refuge auprès de sa grande sœur. Sortant enfin de la réserve, il réfléchissait à un plan d'évasion quand il sentit la main froide de sa compagnie l'empoigner et se diriger vers un couloir avoisinant. Dylan sentit un frisson remonter le long de sa colonne vertébrale et il tressaillit quand sa main rencontra celle de l'homme. Mais celui-ci avait sa baguette sortie et le garçon était assez intelligent pour s'en tenir là. Il écouta distraitement l'ancien Poufsouffle s'il en croyait ses dires, prenant note de la connaissance qu'avait sa sœur avec cet homme. Il lui rappellerait de mieux choisir ses relations à l'avenir. En attendant, cela pouvait servir. Il n'avait toujours pas compris ce que lui voulait le sorcier mais avec un peu de chance, Eloïse le ferait taire sur sa lycanthropie. Ils continuaient leur marche tout en discutant de temps à autre, pour passer le temps et ils arrivèrent bientôt non loin de la valise, le refuge de nombreux éleveurs et des créatures.

**

L'après-midi avait été mouvementé entre les créatures à nourrir ainsi que les éleveurs à renseigner. Mais Éloïse commençait à s'habituer à son nouvel emploi dans la valise. La neige continuait à tomber au-dehors quand elle marcha un peu dans le parc de Poudlard, sa cape bien accrochée autour de ses épaules et une écharpe aux couleurs de Poufsouffle, bien qu'elle ait quitté cette maison depuis quelques années à présent, autour du cou. Au loin elle aperçut, un homme qui venait dans sa direction, la baguette à la main, accompagné de.. Dylan. Les sourcils froncés, elle se dirigea vers eux, la main toute proche de sa baguette au cas où.

Se rapprochant toujours plus, elle reconnut à moitié l'homme qui accompagnait son petit frère. Il lui rappelait vaguement quelqu'un, un ancien camarade certainement. Mais ce qui l'inquiétait davantage restait la mine crispée de son frère. Elle le connaissait par cœur et quand il n'avait pas sa mine joviale, quelque chose clochait. Finalement, elle reconnut les traits de l'homme : Noah. Elle ne l'avait pas vu depuis la fin de ses études et son arrivée était récente, elle ne connaissait pas encore tout le personnel du château.

Des lutins ? Quels lutins ? Bonsoir Noah ! Je ne savais pas non plus que tu étais encore à Poudlard ! J'ai pris mes fonctions récemment. Vous vous connaissez tous les deux ?

Demanda-t-elle en désignant tour à tour du regard les deux sorciers. La jeune femme restait méfiante vis-à-vis de l'expression de Dylan même si elle avait connu Noah durant un petit temps et qu'elle avait pu lui faire confiance avant de le perdre de vue.